par Aurore Blanc
Episode 2: Comment aménager son van et prendre en compte les enjeux liés à la vanlife aujourd’hui?
Dans l’épisode précédent, nous avons esquissé une définition de la vanlife et des vanlifers d’aujourd’hui. Ce second épisode, vous propose des pistes plus concrètes pour vous lancer dans l’aménagement de votre premier van. Nous aborderons aussi les questions sociétales liées à la vanlife: rencontrer l’autre, aménager le territoire pour accueillir les vanlifers… Et les questions liées à l’impact écologique de ce mode de vie et de voyage en pleine expansion. C’est parti pour le 2e round !
Vanlife: Habiter/ se déplacer autrement
On l’a compris: la vanlife est devenue très attractive. Mais par où commencer ? Faut-il s’imposer des contraintes minimalistes à tout prix, ou s’autoriser un nécessaire confort ? Petit tour d’horizon d’éléments très concrets à prendre en compte avant de se lancer dans la vie en van.
Aménager un van
Le choix du véhicule mériterait en soi un article, et je suis loin d’être experte en la matière. Aussi je vous propose plutôt de réfléchir aux constantes de l’aménagement intérieur. J’ai eu l’immense plaisir d’échanger à ce sujet avec Mérédith Frichet, spécialiste dans l’aménagement intérieur d’éco habitat et habitat léger. Voici selon elle les 3 étapes essentielles à l’aménagement :
- Le « zoning » : définir ses besoins.
Avant de vous lancer, demandez-vous quelle utilisation vous allez faire de votre van. Vacances ou habitat ? Durée des voyages ? Nombre de passager·es, animaux ou non ? Quels sont vos besoins en termes de confort (soucis de santé, fatigue) ou d’hygiène? Cela conditionnera forcément l’aménagement de l’espace. Il différera si vous voulez par exemple intégrer une cabine de douche, des toilettes sèches, un frigo, l’eau courante et l’électricité.
- Prendre les mesures et faire des plans
Les idées vont fuser, et certaines ne seront pas réalisables dans un si petit espace. Notez bien toutes les cotes sur un schéma que vous garderez tout au long de l’aménagement. Réfléchissez à la ou les fonctions de chaque espace. Par exemple : le lit peut aussi contenir des rangements, une banquette peut servir de coffre, etc. Cela vous permettra d’anticiper la quantité de matériel nécessaire et d’établir un premier budget. De manière générale, notez TOUT !
- Éviter les erreurs de débutant·es
Pensez au poids de vos matériaux : un surpoids accélère l’usure des pneus et augmente la consommation d’essence.
Ne lésinez pas sur les aérations et l’isolation (sol, parois ET plafond!) car une bonne isolation est la base d’un voyage réussi. En effet, la température intérieure du van influe sur notre sommeil, donc notre bonne humeur, donc notre plaisir de voyager !
Enfin, il serait dommage de rester purement fonctionnel·les : pensez à l’esthétique de votre intérieur. Après tout, vous allez y habiter pendant un moment, alors autant vous y sentir bien !
Les équipements actuels
Je m’attendais à trouver beaucoup de gadgets inutiles et hors de prix au salon… Mais j’ai été émerveillée par les solutions proposées par les micro entreprises ou les grandes firmes présentes. Des ingénieur·es ont déjà trouvé des solutions à beaucoup de problèmes que vous pourriez rencontrer… Alors profitons que le secteur soit en pleine croissance économique pour nous renseigner. Aucune obligation de consommer : on peut très bien vouloir bricoler soi-même et s’inspirer des idées des professionnel·es !
- Dormir
On ne le répétera jamais assez : un bon lit, c’est absolument essentiel. Des entreprises proposent des découpes de mousses sur mesure. Vous pouvez coudre les housses vous-même ou leur demander de le faire, selon vos moyens. Il existe même des lits à suspendre pour les jeunes enfants, que vous pouvez décrocher du plafond en journée pour gagner de la place !
- Cuisiner
Les possibilités sont infinies. De la gazinière de camping transportable en ’extérieur à des box « all inclusive » qui sont de véritables petites cuisines portatives. De la glacière branchée sur l’allume-cigare au mini frigo intégré. J’ai même vu des ustensiles de cuisine qui se posent sur une gazinière et font office de mini-four !
- Énergie
Pour les trajets courts avec étapes chez des ami·es, une ou deux batteries portatives suffisent. Mais si vous avez besoin de travailler en route, de brancher votre PC, ou d’alimenter un frigo, il existe des « batteries solaires » à prix relativement abordables. Comptez autour de 400 euros en entrée de gamme pour un pack batterie multiprises + panneaux solaires pliables à positionner où vous voulez lors de vos pauses. Ce genre de batterie peut aussi se recharger sur secteur avant de partir ou lors de vos étapes. C’est certes un investissement de départ conséquent, mais l’autonomie au quotidien est assurée sans avoir besoin de tirer des câbles et de concevoir un schéma électrique fixe plus complexe.
- Hygiène
La bonne vieille douche solaire est un incontournable à prix très accessible. Mais elle se décline en plusieurs gammes, avec cabine portative pliable par exemple. Idem pour les toilettes allant du bon vieux seau de sciure faisant office de toilettes sèches à des mini WC chimiques. Attention cependant à la vidange (voir partie suivante).
Les enjeux de société autour de la vanlife
Je l’ai dit en introduction : les vanlifers n’ont pas toujours bonne presse. Comment faire changer cela ? Quelles questions se poser pour améliorer notre image et inciter les territoires à proposer des aménagements qui nous facilitent la vie ?
Rencontrer
Qu’on se le dise : rester tranquillement enfermé dans son van (aussi confortable soit-il) comme on l’aurait fait dans un appart’ à La Plagne n’a aucun intérêt. Idem si l’on commence à pester lorsque quelqu’un d’autre s’arrête sur « notre » spot (lieu où on a choisi de se poser). La vanlife a aussi pour but de questionner les enjeux individualistes de notre mode de vie habituel. Elle nous invite à accueillir, partager, aller à la rencontre de l’autre, discuter, échanger des expériences avec d’autres vanlifers, ou bien des locaux. Le premier enjeu humain est donc de se défaire de nos réflexes d’enfermement et de propriété. Quand on s’arrête quelque part, on vérifie qu’on ne dérange personne, on va se présenter, poser des questions, et tout se passe bien !
Consommer local
Rencontrer les locaux, c’est aussi aller vers les commerçant·es et leur montrer qu’on a envie de soutenir le commerce local. Oui, ça coûte plus cher que le supermarché. Quoi que, les marchés locaux proposent souvent un bien meilleur rapport qualité-prix !
Soyons curieux·ses, allons visiter les lieux, posons des questions aux personnes disponibles, montrons que ça nous intéresse. Et pensons à dire merci !
L’un des enjeux du slow tourisme (fait de voyager plus lentement), c’est aussi de profiter du voyage et de ses étapes, pas seulement de se déplacer d’un point A à un point B ! Si tous les vanlifers font ponctuellement cet effort, leur image en sera grandement changée. Alors peut-être des politiques locales pourront-elles émerger en donnant envie aux communes d’aménager l’espace pour nous accueillir.
On se pose où ? Accueillir les vanlifers
Comme l’a bien résumé une jeune femme que j’ai interrogée à ce sujet : « Y’a pas pire législation qu’en France ! » Actuellement, chez nous, il est possible de dormir 7 jours maximum sur n’importe quel espace public tant que rien ne dépasse du van. Comprendre : pas de cale pour les roues, pas de tente de toit ouverte, pas de tonnelle, pas de tables ou de chaises laissées devant le véhicule… En fait, c’est simple : on ne doit pas donner l’impression qu’on s’installe !
Partant de là, on peut chercher des solutions plus sûres pour être certain·es qu’on ne se fera pas déloger dans la soirée, dans la nuit, ou au petit matin. À titre personnel je préfère dormir au maximum en pleine nature en respectant le vieil adage : « Pour vivre heureux, vivons caché·e. » J’ai une préférence pour le bord d’un étang communal, un parking de départ de randonnées, ou un lieu de stationnement près d’une chapelle perdue au fond des bois. Mais dénicher ces spots n’est pas toujours facile. Heureusement, il existe un tas d’applications pour nous aider.
- Pour éviter les conflits avec les locaux et les parkings « sauvages », des applis comme France Passion nous proposent de nous poser chez l’habitant.
- L’appli Park 4 Night est la plus répandue. Mais sa version gratuite est relativement imprécise et n’indique pas toujours si le spot repéré est privé ou pas !
- Autres applis (liste non exhaustive) : Géospot, RVR, Home Camper, Campspace, OnlyCamp, Evazion … Je n’ai pas la place de détailler ici mais il en existe une palanquée. A vous de trouver celle qui conviendra le mieux à vos valeurs et vos envies.
- NB: on peut aussi aimer la vanlife « à l’ancienne » et décider de se débrouiller sans toutes nos applis! Un peu de déconnexion ne fait jamais de mal…
- Se rappeler que l’accès à l’eau est toujours difficile pour celles et ceux qui voyagent en hiver. Mais on trouve de l’eau potable dans la plupart des cimetières !
Et l’écologie dans tout ça ?
Je ne peux clore cet article sans poser cette question qui me semble fondamentale : un roadtrip vertueux, est-ce possible ? Par essence (ahah!), rouler, ça pollue… Mais toujours moins que de louer un Airbnb ou un hôtel, même à deux pas de chez vous! Sans entrer dans les détails, je rappelle juste que l’empreinte CO2 moyenne d’un français sédentaire est tout de même de 9 tonnes par an. SOuvenez-vous que lorsque vous louez un logement quelque part, votre empreinte carbone est décuplée du fait que vous cumulez son impact avec celui de votre logement habituel. Voici quelques éléments à prendre en compte avant de vous lancer dans la vanlife, si votre impact environnemental est un sujet qui vous préoccupe autant que moi.
- Gestions des déchets
Les consignes de tri sélectif peuvent varier grandement selon les régions. Pensez à vous renseigner sur le site des mairies où vous vous arrêtez (cf appli Guide du tri) pour savoir ce que vous pouvez jeter ou non dans les poubelles jaunes. De manière générale, privilégier le vrac, les bocaux, et avoir un mini compost réduit drastiquement vos déchets. Si vous le faites déjà chez vous, gardez vos bonnes habitudes en vadrouille !
- Déplacements
Ça peut sembler évident, mais les véhicules récents sont moins polluants que les vans vintage… Une bonne compréhension du marché actuel des véhicules de type van peut réduire votre impact. Et si vous aimez faire du vélo, renseignez-vous sur les systèmes d’accroche à l’arrière du véhicule. Ainsi, vos petits déplacements pourront se faire plus librement et sans rejet de CO2 !
- Produits ménagers
Attention au greenwashing industriel ! Beaucoup de produits estampillés « verts » dans la grande distribution sont quand même polluants. À titre personnel, je vous conseille d’utiliser un bon vieux bloc de savon de Marseille. Il peut servir sans distinction pour la douche, la vaisselle, la lessive d’appoint, et ses composants sont totalement biodégradables (s’il n’est pas parfumé artificiellement).
- La question épineuse des toilettes
Il n’existe actuellement pas de collecteurs pour les contenus des toilettes sèches, majoritairement utilisées par les vanlifers. Tout mettre dans un sac poubelle dans les ordures ménagères peut poser problème (odeurs, éclatement des sacs lors de la collecte par les éboueurs)… Si vous en avez la possibilité, l’enfouissement ponctuel reste la meilleure solution. En prenant bien sûr quelques précautions : vérifiez que vous vous situez au moins à 200 mètres des cours d’eau, des habitations… et des jardins. Bon à savoir : le papier toilette, plein d’agents chimiques, se dégrade vite mais pollue ! Munissez-vous d’un petit sac plastique pour ramasser votre papier souillé . Sinon utilisez au maximum les toilettes publiques.
CONCLUSION
Vous en savez maintenant assez sur la vanlife pour pouvoir décider si elle vous tente ou pas. Liberté, dépaysement, respect de l’environnement, curiosité, volonté de rencontrer l’autre… Si ces valeurs vous parlent, alors lancez-vous ! Et aidez-nous à rendre caduques les vieux clichés. La vanlife, ce n’est pas du « je-m’en-foutisme », ni de l’égoïsme, ni de l’impolitesse, ni même de l’inconfort dû à une vie à la dure.
C’est un autre mode de voyage qui devient parfois un mode de vie. Loin de la sur-planification quotidienne, elle nous offre l’opportunité de prendre notre temps et d’être plus flexibles. Elle interroge notre rapport au temps, à l’espace, à l’autre. Elle nous apprend l’adaptation, la résilience, et parfois même nous redonne de l’espoir. Alors, vous partez quand ?
Pour aller plus loin
- Aménager un van : les conseils pratiques de l’Agence Mérédith
- Quelques comptes de vanlifers que j’ai recontré·es, à suivre sur Instagram:
- EduCarT, une aventure éducative en van combi
- Lost In Van: suivez les aventures de Marine et Dylan, un couple vanlife a-do-rable!
- Les aVANturiers: Salomé et Mathis, un autre couple qui propose entre autres un e-book pour aménager son van.
- Podcasts sur le slow tourisme des Globe Blogueurs
A paraître: Episode 3 – Vanlifers VS camtareux: la vanlife est-elle un privilège social?
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