Rubrique Carnet de Voyage

Un mois en Palestine #4 – Rues vides et militaires armés

Illustration de Heyton's
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Rubrique Carnet de Voyage

Un mois en Palestine #4 – Rues vides et militaires armés

Illustration de Heyton's

Par Aya Gogishvili

16/07/2017 : 

Service, le matin. Comme d’habitude, nous nous occupons du petit-déjeuner, faisons des massages des mains aux résidents qui le souhaitent, et passons du temps à échanger avec les personnes âgées. Le midi, nous mangeons avec le Père espagnol, qui accompagne les trois séminaristes qui sont finalement arrivés sans encombre (voir épisode 3). Il est très gentil, et ouvert au contact bien qu’il ne parle que le catalan. Les séminaristes m’ont surprise à leur arrivée, je les trouve très jeunes pour des gens qui se destinent à devenir prêtres : le plus jeune a 20 ans, et le plus vieux 26 ans…!

L’après-midi, nous décidons de partir avec Elisa au Museum on the Seam. Le lieu est intéressant, c’est un musée socio-politique israélien, situé sur l’ancienne ligne verte, soit la démarcation entre les anciens territoires israéliens et palestiniens pré-colonisation. Le musée se revendique neutre, et propose des expositions temporaires sur des thématiques religieuses, politiques, ou sociales. Je l’avais déjà visité une fois, durant mon premier voyage. On y proposait une exposition de photos de heurts entre israéliens et palestiniens, selon mon souvenir. J’ai oublié, en revanche, la thématique précise de l’installation que j’avais pu voir à l’époque. 

Nous prenons donc le bus pour la gare routière de la porte de Damas. Aujourd’hui, le chauffeur profite de ses temps de battement pour apprendre l’anglais dans un manuel qui semble dater des années 50. 

Arrivées aux remparts, nous nous dirigeons vers Jérusalem-Ouest. A côté de la gare routière, un petit garçon d’environ 8 ans est en train de vendre des cartouches de Marlboro. Comme à l’accoutumée, bien sûr, il fait très chaud. J’ai pris l’habitude de porter un foulard sur la tête. Notre marche nous emmène à travers le quartier laïc de Jérusalem, au sein duquel nous nous devons de trouver notre objectif du jour. Je ne connais pas la direction exacte pour y retourner.

Nous tournons trois fois autour d’un pâté de maisons, et demandons notre chemin à un commerçant qui nous renvoie vers la porte de Damas. En revenant sur nos pas, nous passons un checkpoint et remontons le long de la voie de tramway pour ensuite montrer notre carte à un autre palestinien. Il passe environ dix minutes à la scruter. Je comprends qu’il ne connaît pas du tout le musée, mais qu’il a vraiment envie de nous aider. Après un laps de temps très long, que nous n’osons pas interrompre par politesse, il nous avoue qu’il ne connaît pas le Museum on the Seam, mais qu’il doit se trouver dans le quartier de Mea Shearim, qui est tout près. Nous suivons ses indications, et continuons à marcher.

Mea Shearim est le quartier juif ultra-orthodoxe. Les rues sont propres, ordonnées, pourvues d’arbres et comptant même des poubelles de recyclage du plastique. Les gens que l’on y croise sont habillés de manière très stricte. Les hommes portent le costume noir, le grand chapeau, la barbe et les peot, ces espèces de boucles qui jouxtent leur barbe. Les femmes sont voilées, portent des vêtements cachant leurs formes, les petits garçons portent la kippa et un châle de prière nommé talit que l’on voit dépasser de dessous leur chemise. Je ne connais pas bien leurs coutumes, mais on m’a toujours présenté cette branche de la religion juive comme étant la plus radicale. Une chose est sûre, le niveau de vie est loin d’être le même que dans les quartiers palestiniens. 

Deux rues plus tard, j’aperçois trois israéliens à l’air roots, portant des amplis. Je les interpelle, et leur demande la direction du musée. Ils nous disent de suivre les rails du tramway, car le Museum serait deux stations plus loin. Malheureusement, le musée est fermé lorsque nous y arrivons ! Peut-être aurions-nous du vérifier les horaires avant d’y aller… Tant pis, on le visitera une autre fois.

Nous décidons de pousser notre excursion jusqu’à la vieille ville pour boire un coup avant de rentrer, apparemment les contrôles sont moins stricts depuis l’attaque récente. Les portes sont tout de même barrées par des militaires israéliens, mitrailleuse en bandoulière, grenades sonores sur leur gilet pare-balles. Lorsqu’on entre, l’ambiance me glace le sang. La plupart des magasins sont fermés, les rues du souk habituellement noires de monde sont vides. Nous sommes quasiment les seuls touristes, et les rares Palestiniens que nous croisons résident très probablement dans l’enceinte du vieux Jérusalem. La ville est barrée de partout, les israéliens ne doivent pas laisser passer grand-monde… C’est presque une ambiance de mort. Nous buvons tout de même un thé dans un café miteux pourvu de tables de jardin, pendant que des pré-adolescents jouent à des jeux de fête foraine pour repartir avec des bières et des cigarettes. On rentre, ensuite. Je demande à un israélien s’il sait quand la vieille ville sera rouverte à tout le monde. Il pense que ça le sera dans quelques jours. On le remercie. « God bless you. » A côté de l’endroit où un gamin vendait des clopes, deux autres font les poubelles. 

À dix-neuf heures, Soeur Marina a organisé un chapelet où elle a tenu à rassembler tous les bénévoles, le Padre, ainsi que Soeur Camille (d’origine espagnole). Une résidente, Angela, se joint à nous. La petite cérémonie se tient au pied d’une statue de la Vierge située dans le jardin. Nous allons égrener un chapelet en disant la prière de l’ordre des Filles de Notre-Dame-des-Douleurs. Pour Charlie et moi, c’est un temps de méditation bien choisi, et puis un moment de partage agréable après ce sentiment glaçant vécu entre les murs de la Ville Sainte. Lors de la prière, le français côtoie l’arabe, l’espagnol, le latin et le catalan. C’est joli… Après cette demie-heure hors du temps, repas entre bénévoles. Ensuite, cigarette, bière, air du soir chargé de musiques populaires arabes, de chants du muezzin et de poussière, et dodo… 

À suivre…

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