Rubrique Chronique de Randos

Mystérieuses chapelles en Centre Bretagne 1/2

En Bretagne, les chapelles poussent comme les champignons. Et chacune a une histoire et des secrets à conter à qui sait tendre l'oreille...
Chapelle Saint Trémeur - Illustration de HeyTon's
Illustration de HeyTon's
Rubrique Chronique de Randos

Mystérieuses chapelles en Centre Bretagne 1/2

En Bretagne, les chapelles poussent comme les champignons. Et chacune a une histoire et des secrets à conter à qui sait tendre l'oreille...
Chapelle Saint Trémeur - Illustration de HeyTon's
Illustration de HeyTon's

Par Aurore Blanc

Depuis que je vis en Bretagne, je ne me lasse pas d’en sillonner les forêts et les rivières. C’est d’abord la dimension païenne du rapport de cette région à la nature qui m’attire dans mes choix d’excursions. J’ai appris au fil de mes promenades que, bien que cette vision d’une nature magique soit largement fantasmée, il est des endroits d’où émanent indéniablement une force vive et des mystères insondables. J’ai appris aussi que cette aura mystique n’est pas propre aux seules forêts et rivières. Car la Bretagne est aussi une région profondément chrétienne où les chapelles ont presque aussi bien poussé que les chênes à présent centenaires. 

C’est sur les conseils de mon amie A. que je suis partie avec Antonin à la rencontre de la chapelle Saint Michel de Braspart, située sur la montagne Saint Michel ( à ne pas confondre avec le célèbre mont du même nom !), aux alentours de la commune de Saint Rivoal dans le parc naturel régional d’Armorique. A. m’avait raconté un soir, au coin du feu de la jolie taverne de l’Elixir, que dans un de ses souvenirs d’enfance, la pluie s’était mise à y tomber soudainement lorsqu’elle était sortie de la voiture sous un ciel jusque là clément. Elle se souvenait aussi qu’aucune croix n’y restait en place, ni dehors, ni dedans, ce qui avait piqué ma curiosité.

Après une virée ressourçante dans la forêt de Huelgoat (voir article précédent), nous nous garons tout en haut du mont et nous asseyons un moment pour contempler la vue imprenable sur les environs. Depuis une dizaine d’années que je vis en Bretagne, je n’avais jamais vraiment compris ce que désignait le terme «  lande ». Du haut de la montagne Saint Michel, cheveux au vent, je prends enfin la mesure de ce qu’il signifie. Quelques forêts au loin, aucun village à l’horizon, et d’immenses étendues vertes où la végétation rase cache quelques tourbières. La lande, la lande, et encore la lande où j’ai cru entendre toute la nuit précédente danser les Korrigans des histoires de mon enfance. 

Nous nous avançons vers la chapelle qui effectivement ne porte pas la traditionnelle croix en haut de son petit clocher. A l’intérieur, pas de bancs, pas d’autel, pas de croix non plus. Mais un nid d’hirondelles caché dans la charpente. C’est la première fois que je retrouve cette ambiance de sanctuaire spontané dans un édifice religieux. Les quelques chaises, les rebords des fenêtres et la petite table en pierre contre le mur du fond sont couverts de fleurs séchées, de galets peints et de petits mots de paix. Des graffitis amoureux ornent les murs, rappelant en toute simplicité que la vie est belle et qu’il faut en éprouver de la gratitude autant que faire se peut.

Un drôle d’homme se tient là, debout, un pendule à la main qui tourne avec un mouvement raide et précis. Il nous explique que c’est sur ce point énergétique que devait se trouver l’autel, et que les édifices religieux ne sont jamais construits par hasard. Selon lui, il était courant de faire appel à des personnes aux dons particuliers au moment de bâtir les lieux de culte, même les lieux chrétiens, et cela ne nous semble pas dénué de sens à nous qui arpentons la Bretagne à la recherche de lieux singuliers où nous faisons régulièrement d’étonnantes rencontres. L’homme au pendule nous explique que la chapelle Saint Michel de Braspart est construite sur « la ligne Saint Michel », un grand courant d’énergie tellurique qu’il appelle aussi le « le serpent » ou « la vouivre ». A l’aide d’une grande baguette de cuivre, il nous montre comment repérer les courants d’énergie qui traversent le lieu et nous explique qu’il était important de les repérer car ils aidaient les fidèles à se décharger de leurs énergies négatives pour pouvoir se recharger au moment de l’eucharistie, point culminant de la messe catholique. 

Le soir-même, après une journée de vadrouille, nous tombons par hasard sur un lieu qui concrétise étonnamment tout ce que nous a dit cet homme. La chapelle Saint Trémeur, cachée au bas d’un chemin abrupt au cœur d’un écrin de verdure dans les environs de Guerlesquin, a visiblement été construite une première fois au XIIe siècle sur le lieu d’un culte celte très ancien, en témoigne le petit dolmen qui la jouxte. Cette adorable chapelle a la particularité d’être construite sur deux niveaux. L’escalier qui contourne la façade principale et descend vers les fondations de l’édifice mène à une petite source à demi enfouie et appelle clairement les croyants à la purification. Le bassin est surmonté d’une étrange statue représentant un homme qui tient sa tête dans ses bras. Après quelques recherches, nous retraçons le fil de l’histoire de Saint Trémeur. Selon la légende, un moine Gallois (qui deviendra le futur Saint Gildas) venu christianiser l’Armorique au VIe siècle  s’était retiré en ermitage sur le lieu. C’est auprès de lui qu’est venue se réfugier la reine Triphine (« fidèle », en Galois), femme du cruel roi Conomor « le maudit » qui régnait en ce temps sur le nord de L’Armorique. En effet, une prophétie délivrée par une vieille sorcière avait prédit au tyran qu’il serait un jour tué par son fils, ce qui le poussait invariablement à assassiner ses épouses ( la légende pourrait être une des sources ayant inspiré Charles Perrault pour son conte «  La Barbe Bleue »). L’histoire se poursuit avec la naissance du fils de Triphine et Conomor, Trémeur, qui grandit caché de son père à l’ermitage sous la protection de Saint Gildas. Jusqu’au jour où, devenu jeune homme, il affronte par hasard son père dans un tournoi. Ce dernier, reconnaissant sur le visage juvénile les traits de sa femme enfuie, le décapite sans autre forme de procès. Une histoire bien tragique qui peut expliquer pourquoi la source au pied de la chapelle a la réputation de guérir les maux de tête. 

J’y crois ? J’y crois pas ? Pour nous qui avions choisi de dormir sur les lieux, ce fut tout du moins un moment apaisé et hors du temps où le chant des multiples oiseaux et le bruissement du vent nous inspira une chanson que nous parvînmes à composer et enregistrer en une heure à peine.

Bien d’autres légendes entourent les chapelles et vestiges mégalithiques de la région. Rendez-vous dans deux semaines pour connaître l’histoire de la sorcière qui affronta Saint Gildas en duel, et celle d’une chapelle qui guérit des épidémies. En ce moment, ça peut toujours être utile !

Retrouvez le travail d’Antonin sur son Instagram!

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